Martine Storti Site

L’IVG ne relève pas de la santé mais des droits humains

Tribune dans Libération 25 mars 2023

Le 8 mars, lors de la cérémonie célébrant l’inscription de l’interruption volontaire de grossesse dans la Constitution française, le président de la République a annoncé sa volonté d’inscrire le droit à l’IVG dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Excellente nouvelle.

Mais, quelques jours plus tard, le ministère de la Justice a réaffirmé, pour justifier le refus français d’une proposition faite par la Commission européenne concernant le viol, que la définition de celui-ci ne relevait pas de l’Union européenne mais des Etats membres. Position française déjà énoncée en novembre 2023 lors du débat à Bruxelles sur la directive relative à la lutte contre les violences faites aux femmes. C’est ce qui s’appelle «se tirer une balle dans le pied».

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Un curieux féminisme

Face au conflit israélo-palestinien, exemple parfait de complexité, nous estimons « en tant que féministes » qu’assimiler la condamnation des crimes du Hamas au soutien aux suprémacistes israéliens et aux colons de Cisjordanie ou à l’oubli des femmes palestiniennes dans la bande de Gaza relève de la manipulation, non seulement du féminisme mais aussi de cette qualité essentielle qu’est l’honnêteté intellectuelle. Il en va du féminisme comme du désir d’émancipation.

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Pluralité de l’antisémitisme : de l’extrême droite à l’idéologie décoloniale

S’affirmer, en ce moment, de gauche, féministe, pro-israélienne, au sens de juger légitime l’existence d’Israël, (par-delà les profonds désaccords avec l’action du gouvernement israélien et les colonies en Cisjordanie) et pro-palestinienne, au sens de juger légitime un Etat palestinien ( malgré le Hamas qui n’en veut pas et qui est le principal ennemi du peuple palestinien) exige de tenter quelques clarifications. Pendant des siècles, l’antisémitisme s’est décliné de multiples façons. A gauche il se donnait pour la marque d’une lutte anticapitaliste, la figure du banquier riche et prédateur s’identifiant à celle du juif. A droite et à l’extrême droite, l’antisémitisme...

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Soutenir le Planning n’exige pas l’abandon de toute critique

Tribune publiée dans Le Monde du 8 juin 2023

   

Deux tribunes relatives au Planning familial ont été récemment publiées, la première dans Le Point du 16 avril 2023, titrée de manière très populiste « Planning familial : « nos impôts, leur intox », et signée par « Un collectif d’intellectuels et de médecins » ; la deuxième dans Le Monde du 20 mai 2023 titrée « Le Planning familial est partie prenante dans toutes les questions féministes » et signée par « un collectif d’universitaires, de médecins, de sociologues et d’écrivains ».

 A-t-on le droit, malgré l’éminence des signataires de ces tribunes, d’être en total désaccord avec l’une et avoir des désaccords avec l’autre ?

Les lignes qui suivent sont moins relatives au Planning familial en tant que tel qu’à un fonctionnement idéologique et elles n’émanent pas d’un « collectif » mais de militantes féministes.

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Annulation de la différence des sexes ou de leur indifférenciation ?

Il parait, si l’on en croit quelques livres, colloques et articles, que la différence des sexes est menacée d’annulation et qu’il faudrait donc s’efforcer de la défendre et même de la « sauver ». Rappelons d’abord que cette crainte de l’annulation de la différence des sexes est un refrain et même une rengaine qui accompagnent depuis plus de deux siècles chaque moment, chaque étape et chaque enjeu de l’émancipation des femmes, qu’il s’agisse d’un abandon d’une contrainte, par exemple celle du corset ; d’un emprunt à une tenue vestimentaire qui leur était interdite, par exemple le port du pantalon ; d’une conquête par les...

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La fabrique du néoféminisme

Il y a des termes fourre-tout, ils sont bien pratiques, ils permettent de tout confondre et de se dispenser de la complexité. Néo-féminisme en est un.Etre en désaccord avec tel ou tel courant féministe ou qui s’auto-qualifie ainsi et le critiquer est bien sûr un droit indiscutable. Ce qui l’est moins, ce sont les procédés mis en œuvre :  homogénéisation, généralisation, simplification, caricature, indifférence aux nuances, aux différences, aux distinctions.

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C’est par l’Iran de 1979 que j’ai commencé mon livre “Pour un féminisme universel”

En 1979, des féministes de divers pays et pas seulement occidentaux, affirmèrent une solidarité politique avec les manifestantes iraniennes, ayant alors plus de lucidité à l’égard du régime qui s’annonçait que bien des gouvernements et bien des intellectuels ou militants d’extrême gauche qui n’avaient pour seule boussole que la lutte contre « l’impérialisme américain et /ou occidental » et dont beaucoup ont regardé avec méfiance les initiatives féministes, méfiance évidemment partagée par les tenants du nouveau régime.

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Entretien dans Libération

Extrait de mon entretien publié par Libération (22 juillet 2022)

Pourquoi, selon vous, le corps des femmes est-il toujours attaqué, contrôlé par les hommes ?

Sans doute y a-t-il de nombreuses raisons et je vais en oublier car il faudrait des pages et des pages pour répondre à votre question. Je crois qu’à la base il y a quelque chose où se mêlent la frustration et la peur. Frustration, jalousie même relativement à la grossesse, d’où la valorisation, en compensation, des organes sexuels masculins et la dévalorisation des féminins. Peur de ne pas être le père de l’enfant à naître, d’où le contrôle. Mais peur aussi de la sexualité féminine, le «continent noir» de Freud à jamais mystérieux et subtil. D’où la domination, avec l’idée que la véritable sexualité, la sexualité de droit en quelque sorte, est la sexualité masculine, les femmes n’étant là que pour la satisfaire. Et la violence si elles refusent.

La suite https://www.liberation.fr/plus/les-violences-contre-les-femmes-sont-helas-universelles-20220722_HUZPFTFZTNBPHEKCSPMZ5LGN74/?redirected=1